lundi 18 novembre

Le vide, chez les autres, me donne le vertige. C'est pourquoi je goûte assez peu les blogs - excepté l'agenda (un faux) et un ou deux trucs pas trop mal écrits. Et le journal ? Ah mais cela n'a rien à voir avec un blog !

mardi 19 novembre

Toutes les machines fonctionnent, ici, à la base, et cela ne s'était pas produit depuis longtemps. Nous entretenons tous, à un degré ou à un autre, un rapport magique avec nos computers. Le virus, c'est la maladie; la panne brutale, l'accident. Et tant que la machine s'en relève, nous avons le sentiment de pouvoir tenir le coup également. C'est pourquoi je me sens bien ce matin, dans le ronronnement des ventilateurs.

mercredi 20 novembre

Difficile de ne pas être sensible au passage du temps lorsque l'on tient un journal. C'est même le principal intérêt de cet exercice un peu vain : contempler une succession d'instants fugitifs qui s'écoulent en s'éloignant inexorablement.

jeudi 22 novembre

Parfois, c'est un peu fatigant d'être toujours considéré comme du gibier. Mais tel est le destin du consommateur. Tiscali rachetait les hébergeurs comme Chez et Respublica, et on se demandait pourquoi; maintenant on sait. C'était pour prendre en otage les webmasters et les obliger à prendre un abonnement chez eux. Et tout ça avec le ton niais du village du prisonnier : "Devinez la bonne surprise qui vous attend !" Well done !

vendredi 23 novembre

Je n'ai rien contre un certain désordre. Les périodes troublées, les conflits sociaux, les menaces de paralysie, je dois l'avouer, me réjouissent. Tout ce qui perturbe l'ordre quotidien sans entraîner de dégâts excessifs (pas de blessés ni de morts) est bon à prendre. Peut-être s'agit-il du syndrome de ceux qui ont vu leur école fermée au mois de mai et ne se sont jamais totalement remis de ces très grandes vacances.

samedi 24 novembre

Lorsqu'on veut se reposer, il y a la citation. Voici quelques extraits de la GFIV-Connection où Captain P@t donne son avis sur une Björk (une chanteuse à propos de laquelle je me garderai bien d'émettre un jugement vu que je ne l'ai jamais écoutée avec l'attention requise).

Objet : bieurk

Pat : Je supporte pas bjiork. Elle a un nom de dégueulis, une tête de triso, un corps de vieille et une voix insupportable. Quelqu'un peut-il m'expliquer ce qu'on peut lui trouver ?

Bobig : moi elle m'intrigue. je n'ai pas d'explications

Pat : moi non plus. comment peut-elle être si répulsive pour moi et si attractive pour toi ?

Bobig : moi j'aime beaucoup. je n'ai pas d'explications.

Pat : on doit pouvoir expliquer, même mal, pourquoi on aime un truc (ou pourquoi on peut pas le saquer) - ou alors, on est pas un vrai looser.
par exemple, je viens de revoir "harry, un ami qui...", et bien c'est un très bon film, avec un excellent scénario. ça touche à pleins de sujets importants, comme la castration familiale, la création, et sans aucune pesanteur. et quand le film se termine, on est bien. voilà pourquoi j'aime ce film.
bjork est un gros boudin maniéré qui s'habille mal et fourgue avec tous les moyens du marketing des plans foireux de sorcière nordique. voilà pourquoi je peux pas l'encaisser.

Zara : putain, me vlà d'accord avec pat, dis donc

dimanche 24 novembre

Cette nuit, la fée MP3 a téléchargé sur mon ordi huit titres de Townes Van Zandt. Je suis dans l'obligation de les écouter. Il y a un belle version de "Cocaine", une chanson que reprend Captain P@t, on dirait que c'est enregistré live dans un bar devant une dizaine de personne. Idem pour la reprise de "Dead Flowers" que vous connaissez peut-être : elle se trouvait sur la BO du film des frères Cohen, The Big Lebowsky. Le reste est de toute splendeur. Et tant pis si les majors me mettent en prison, j'écouterai Townes Van Zandt.

lundi 25 novembre

Je ne sais pas précisément ce qui me fait tenir ce journal. Il y a la satisfaction de démarrer la semaine en écrivant la date du lundi (souvenirs d'école primaire, "ouvrez votre cahier", et "soulignez en rouge").

mardi 26 novembre

Quelle bonne idée ! John Wesley Harding en mp3 avec un son nickel ! Mon préféré - enfin je crois. Qui d'autre aurait pu pondre ça en pleine période psychédélique (1967) ? Ce disque est complètement intemporel. Les métaphores obscures continuent à nous émouvoir. Le classicisme minimaliste de l'accompagnement (une basse, une batterie discrète) constitue le support idéal pour la voix - la plus belle que Dylan a jamais eue (et pourtant, dieu sait s'il mue souvent !).

mercredi 27 novembre

Je me plains un peu pour la forme, mais j'aime assez le fait d'avoir à aller travailler quelques jours dans la semaine. Le contact avec la banalité ordinaire, à condition de n'être pas trop prolongé, est indispensable à un développement harmonieux. Un esprit sain dans une société en déliquescence.

jeudi 28 novembre

C'est horrible, je suis de moins en moins de gauche (ce qui ne signifie pas obligatoirement de plus en plus à droite). Les syndicalistes que je croise ne sont pas très sympathiques. Ce n'est pas facile pour eux, remarquez. Ils savent exactement combien vous gagnez et sont contraints de cacher des sentiments aussi peu glorieux que l'envie et la jalousie sous de grands idéaux égalitaires qui sonnent faux.

vendredi 29 novembre

J'ai lu quelque part que les natifs de mon signe, dans l' horoscope chinois, peuvent difficilement accepter l'idée d'un compromis. Voilà qui relativise ce que j'avais jusqu'alors attribué à ma seule force morale.

samedi 30 novembre

Tiens ! J'ai vu pour la première fois le ministre de la culture (dont je ne retiens pas le nom - Arpaillan ?), hier à la télé. Sa cravate était remarquable : large comme un foulard, d'un orange vif tirant sur le rose, avec des reflets fluo. Au-dessus, une tête dénuée d'expression débitait un discours digne d'un maire de village, à propos du vénérable Dumas. Et alors ? Rien. Ce type ne pas laissé aucune impression (ce qui, tout compte fait, est assez rarissime).

dimanche 1 décembre

Le mois tant redouté arrive. Je ne vais pas vous embêter avec ma phobie de Noël. Sachez seulement que je souffre à chaque fois qu'arrivent les chocolats et les cadeaux et ayez une pensée émue pour moi le soir fatidique.

lundi 2 décembre

Un lundi où l'on ne travaille pas n'est pas un vrai lundi. Ca ressemble à un dimanche. Un vrai. Pas un faux dimanche où l'on sait que l'on n'a pas à retourner travailler le lendemain. Mon weekend est complètement perturbé !

mardi 3 décembre

J'envie parfois les certitudes des réactionnaires. Ils ont des solutions pour la plupart des problèmes (des choses qui, selon eux, ont déjà fait leurs preuve avant). Moi, je n'ai que des intuitions - et encore.

mercredi 4 décembre

Lorsque rien ne vient, ne pas insister. Lorsque quelque chose vient non plus, d'ailleurs.

jeudi 5 décembre

Hier soir, j'ai fait mon quart d'heure trimestriel de télé. C'est tombé sur Mireille Dumas, du solide. "J'ai arrêté de boire", avec Daniel Guichard parmi les invités et le psy de service. Je crois que j'aurais bien aimé ce métier, psy pour plateau de télé. L'art de formuler des évidences, d'enfoncer des portes ouvertes, de ne rien dire, mais avec conviction et assurance. L'animatrice me fascine. Elle est dans un état paroxystique permanent. Rire, étonnement, complicité, très fort intérêt : les émotions fortes se succèdent sur son visage à un rythme soutenu sans aucun temps mort (ce qui est, en psychopathologie, le symptôme le plus tangible de l'hystérie).

vendredi 6 décembre

La middle age crisis ? Vous êtes dans la cuisine attendant que l'eau commence à frémir, ou bien sur le canapé tenant à la main un livre, et soudain vous vous demandez si vous n'êtes pas en train de rater votre vie. Curieusement, cette idée ne vous effleurait pas quinze ans plus tôt, alors que vous étiez en plein gaspillage de temps et d'énergie. Qu'est-ce qui a changé ? La quantité d'énergie disponible ou le temps restant pour en faire usage ?

samedi 7 décembre

Qui dira l'isolement, l'immense solitude de ceux qui ont choisi de consacrer leur vie à l'oisiveté dans une société de productivité où même les loisirs sont conçus sur le mode de l'activité frénétique. Pour tenir face au discrédit méprisant et aux soupçons les plus variés, il faut sans cesse chercher une légitimité - du côté des philosophes chinois, par exemple, ou de leurs drscendants contemporains. Ainsi le livre de Denis Grozdanovitch, Petit traité de désinvolture (José Corti), où l'on peut lire ceci :

dimanche 8 décembre

Je sens vaguement qu'il y a une chose que j'oublie et que je devrais faire, oui, mais quoi ?

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