La scène se passe au réveil. Juste après le café. A l'heure où je m'installe devant mon écran pour lire le journal. Et là, je tombe sur cette phase mystérieuse, incompréhensible, comme un cut up de Joe le Gloseur : "Mort aux bassistes". Je me suis demandé une fraction de seconde ce qu'avaient bien pu faire ces pauvres musiciens pour justifier une telle haine. La phase exacte était "Mort aux baassites (et à l'amérique)". Retour dans le monde réel réussi.

Génial, le "grand débat" sur l'école hier soir à la télé, avec interruption momentanée de l'image et du son (comme à l'époque de l'ORTF, quand on voyait débarquer le petit train de l'interlude).

mercredi 10 septembre

Nelson Goodman est parvenu à me convaincre. Il n'existe pas une "réalité" donnée (conception empiriste). Nous construisons des mondes à l'aide de systèmes symboliques.J'ai même le sentiment que l'on pourrait pousser le truc un peu plus loin, genre Tchouang Tseu se demandant s'il est un homme qui rêve qu'il est un papillon ou s'il est un papillon rêvant qu'il est un homme.

jeudi 11 septembre

On peut se lasser momentanément de la trompette de Miles Davis (je ne sais pas pourquoi, on dit "Miles", rarement "Davis"), comme on peut, certains soirs, trouver harassantes les ascensions par la voie express Coltrane. C'est l'occasion de renouer avec le son de Sonny Rollins, ou avec the very sensitive Coleman Hawkins.

 

vendredi 12 septembre

L' écoute deBeggars Banquet est associée à tout un tas d'images, d'émotions. François Bon a bien parlé de ces rêveries, l'impact énorme que tout cela a eu pour nous qui étions coincés au fond de notre province française seventies. La pochette en cartons épais, la typographie "faire-part", la photo orgiaque retouchée à la main. L'ennui des vacances, la fenêtre ouverte et Prodigal Son qui commence à gratter sous l'aiguille du pick-up portable. Les guitares acoustiques, la slide de Keith, la texture sonore des guitares électriques. Et les chansons que l'on passait en revue le soir, sur les marches du collège (c'était Porey, un branché de l'époque avec coiffure à la Mick Taylor, qui nous montrait les accords).

samedi 13 septembre

Lorsque je pense à quelqu'un de connu, quelqu'un dont on n'a pas entendu parler depuis un moment et dont on se dit "Tiens ! Que devient-il ?", il n'est pas rare que ce quelqu'un réapparaisse dans les médias (je n'utiliserai plus jamais le mot spectacle). Cela peut-être à l'occasion d'une promo (nouveau roman, disque, film, expo) ou d'un come back inattendu. Parfois, cela s' accompagne d'une mauvaise nouvelle. L' autre jour, dans mon jardin, je pensais à Johnny Cash...

dimanche 14 septembre

En avril, par-là, une exposition Hopper in france. J'attends ça depuis une éternité ! J'ai hâte de voir s'il y a cette qualité de touche "à la Manet" que l'on croit deviner sur les reproductions.

lundi 15 septembre

Un débat sur l'école ? Pourquoi pas. Mais il faut savoir qu'il arrive avec une bonne dizaine d'années de retard. Et que, pour l'essentiel, les problèmes sont situés en amont, dans les structures sociales inégalitaires.

mardi 16 septembre

Miles Davis, c'était vraiment la grande classe. Vous connaissez cet extrait de film tourné en concert, à l'époque où Miles avait son quintette de rêve (including Bill Evans et John Coltrane) ? On le voit patienter pendant un solo de Coltrane. Sa manière d'attendre en tirant sur une clope pendant que le saxophone mitraille les étoiles, c'était vraiment la grande classe.

mercredi 17 septembre

La pub ultime : cette image d'un suspect de l'assassinat d'Anna Lindh a été massivement diffusée par la police.

jeudi 18 septembre

Extrait d'une correspondance avec un lecteur attentif :

Je ne veux pas passer pour un vieux "pion" correcteur, mais il me semble que
vous avez fait une inversion dans votre joli commentaire sous la photos des
deux génies (pour ces deux-là on peut utiliser le terme) en session :
C'est Coltrane qui fume (saxo) pendant que Miles joue (trompette).

Oui. J 'ai choisi cette photo parce qu'elle est historiquement synchrone - mais, il est vrai, avec les rôles inversés.
Encore bravo !

PS : je viens de voir qu'il y avait une video Miles Davis/John Coltrane (So what) disponible sur Kazaa et je crois que c'est la bonne.

vendredi 19 septembre

The Sleepy Jackson. Je ne sais pas si c'est le groupe de la rentrée, vu que je n'ai écouté que celui-là (je ne lis plus les Inrocks) mais une chose est sûre : j'aime bien cette musique citationnelle où des ingrédients que l'on connaît par coeur vous arrivent présentés en une nouvelle combinaison, inédite et fraiche. Dans le genre, The Sleepy Jackson est un orchestre remarquablement varié.

samedi 20 septembre

Quelques que soient vos efforts pour aborder différemment les choses, faire en sorte qu'elles se déroulent autrement, vous finissez par constater qu'il existe une forme de scénario qui vous est spécialement dévolue et qu'il n'y a pas vraiment d'échappatoire.

dimanche 21 septembre

Le beau temps n'est rien d'autre que la suite de la canicule. Celle-ci est liée au réchauffement climatique de la planète. Ce réchauffement est provoqué par l'effet de serre, conséquence directe de l'activité humaine organisée dans le cadre du capitalisme post-industriel ultra-libéral. Parler d'"été indien", non seulement cela fait penser à Joe Dassin, mais cela consiste à opérer une rupture de la chaîne déductive logique (du type cause-conséquence).

lundi 22 septembre

Il y a tout un tas de beaux films qui se passent en automne. L'automne est propice aux sentiments mélancoliques liés à la fuite du temps. C'est le meilleur moment pour lire Proust, ou Pessoa. On ne peut concevoir une rentrée des classes sans nuages et bourrasques. Et les pulls, on en fait quoi ? Rendez-nous l'automne !

mardi 25 septembre

Je suis d'un naturel pacifique. Pourtant, de temps en temps, quand je rencontre un bien méchant-bien bad sur mon chemin, je n'ai rien contre une bonne vieille bagarre, métaphorisée à travers les processus de socialisation. Attention : la violence symbolique n'est pas une version soft, femmelette, de la baston physique. C'est tout aussi sanglant, dans un autre genre.

mercredi 24 septembre

Il s'en est fallu de peu pour que je rate le rendez-vous quotidien. Hier, le modem sifflait et refusait toute connexion. Première activité ce matin, après le café : les opérations magiques de base pour ceux qui n'y connaissent rien. Et pour une fois, ça a marché. Here I go again !

jeudi 25 septembre

Ceux qui réalisent ce pour quoi ils sont faits voient leur projet soutenu par les dieux. Problème : et ceux qui sont faits pour (exemple au hasard) être Sarkozy ? Et bien, c'est pareil. A noter : la question ne se pose jamais en ces termes dans la philosophie chinoise.

vendredi 26 septembre

Le mouvement pro-automne a gagné. Nous devrions être débarrassés du soleil dans les jours qui viennent et, surtout, enfin retrouver la pluie (I'm happy when it's rain).

It's gonna rain (it's gonna rain)
I said it's gonna rain (it's gonna rain)
Yes, it's gonna rain (it's gonna rain.)
I'm so happy to say (it's gonna rain)
Oh it's gonna rain (it's gonna rain) on the world today
Forty days and forty nights (it's gonna rain)
Forty days and forty nights (it's gonna rain)
Hallileua, it's alright (it's gonna rain)
Everybody's sleepin' tight (it's gonna rain)
Oh, it's alright, it's alright, it's alright, it's gonna rain tonight.
Repeat chorus three times

samedi 27 septembre

Le sentiment du bonheur ? Attention aux clichés ringards (oui, il est fugitif et toutes ces sortes de choses). Lorsqu'il est là, il peut se montrer étonnement costaud, résistant au marasme ambiant, limite invulnérable (illusion plaisante). Ce que je préfère dans ce sentiment d'allégresse (assez rare, je vous rassure), c'est que tout paraît neuf, réactivé. C'est intense et doux à la fois (rien à voir avec l'excitation hystero) - et transitoire, oui je sais.

dimanche 28 septembre

Tiens ! On ressort mon album préféré de Neil Young. Et tout le monde s'accorde sur sa beauté exceptionnelle.

 

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