lundi 30 juin

Pendant une (courte) période, j'ai eu un abonné qui se considérait comme un spécialiste : l'art, c'était SON truc. Lui seul comprenait vraiment de quoi il retournait. Et à chaque fois que je donnait mon avis sur un peintre, une expo, un tableau, j'avais droit à un petit message où il me disait que ce n'était pas ça du tout. Vous savez quoi ? Je ne vais pas l'assassiner sous les sarcasmes. Mieux : je lui pardonne car j'ai pitié - pitié pour l'ego en équilibre instable, prêt à basculer dans le néant d'un moment à l'autre (comme le mien, comme le votre, comme celui de tout être humain, en fait).

mardi 1 juillet

Ce matin, il pleut, ça sent bon. On se croirait en Bretagne. Il manque juste le Télégramme.

mercredi 2 juillet

This morning (pas facile d'éviter les répétitions), une surprise nous attendait sur le blog du GFIV. Dans la nuit, un tag avait été déposé de manière sauvage, par un hacker militant, en soutient à la lutte des intermittents du spectacle. Par qui ? hum... Le graphisme en rouge et noir nous avait mis sur la piste (confirmée peu de temps après par un message éclair) : il s'agissait juste d'un Troudair.

jeudi 3 juillet

A quoi servent les vacances ? A réaliser, au bout de quelques jours, que nous ne nous appartenons pas vraiment le reste du temps.

vendredi 4 juillet

Les beaux jours sont à venir, oui, mais en attendant il va falloir ramer, souffrir, se priver (sauf pour une poignée d'élus qui profite du système, of course). Depuis 1975, on entend les mêmes propos : des économistes perchés voient venir l'abondance de l'expansion au loin, mais il y a des gros efforts à faire pour y arriver. Chômage, licenciements, restrictions, austérité, rigueur, etc. Le moment venu, surprise et déception : en dépit de ces efforts (inégalement partagés, cela va sans dire), le but n'est jamais atteint. Résultat : c'est reparti pour un tour. Il va encore falloir se priver, faire des efforts, parce que la croissance n'est pas "au rendez-vous" (même si les profits, eux, le sont). C'est toujours le même scénario, en boucle, avec des motifs qui varient : crise, récession, baisse de ceci, hausse de cela (le tout expliqué, à l'aide de chiffres largement invérifiables, par des "experts" employés d'organismes opaques genre FMI ).

samedi 5 juillet

Le problème avec l'été, c'est que le temps ralentit et qu'il y a moins de choses à mettre dedans. On se croirait coincé dans une location, un camping ou un hôtel, quand il pleut et que le seul événement du coin, un festival, vient d'être annulé.

dimanche 6 juillet

Nul ne peut prétendre échapper aux obligations sociales. Celles-ci sont par ailleurs indispensables à la cohésion du groupe (on se croirait dans une disserte de philo). Mais faut-il pour autant se plier aux injonctions terroristes concernant la forme, physique (être sautillant, courir comme un con le long des routes au risque de se faire écraser) et morale (sourire perpétuellement comme n'importe quel présentateur TV, voir obstinément le côté positif des choses). Et que répondre à ce voisin qui vous écrase jovialement la main à chaque fois que vous le rencontrez en demandant inlassablement "Alors ? La forme ?".

lundi 7 juillet

L'ultra-libéralisme a gagné. La rage, le dépit, sont inutiles. Il faut juste se trouver une position - la moins inconfortable possible - pour les années à venir (choisissez bien, ça peut durer). D'abord, garantir les revenus (surtout ne pas être pauvre, précaire, en fin de droit, de contrat, ce genre de choses). Ensuite, devenir une belle âme, réfugiée dans le monde de la culture comme dans une citadelle (imprenable par les nouveaux barbares). De ce refuge aéré, penser à cracher dans la soupe de temps en temps pour bien marquer son désaccord avec l'ordre du monde.

mardi 8 juillet

L'art de commencer un journée : Five spot blues (Thelonius Monk) + soleil derrière les arbres + bonne nouvelle dans les journaux (enfin un échec pour Sarko).

mercredi 9 juillet

La méthode du gouvernement pour imposer des réformes impopulaires est d'une efficacité diabolique : choisir avec soin le moment où les grèves seront tournées de manière suicidaire contre les grévistes eux-même, contre ce qui justifie leur existence (les examens pour les enseignants, les spectacles pour les intermittents).

jeudi 10 juillet

Maintenant, je ne me force plus. Et depuis cette année, j'assume. Les vacances ne m'intérressent pas. J'ai toujours trouvé ça un peu nul. Je veux dire, le fait de se déplacer, d'aller dans un endroit où l'on n'a rien de particulier à faire, en touriste. Résultat : vous vous ennuyez parce que toutes vos affaires sont restées chez vous.A la limite, ça va deux ou trois jours, mais pas plus. Et encore, uniquement pour rassurer les voisins.

vendredi 11 juillet

Certains jours, je me sens déborder d'une bienveillance sans faille. Mais au bout d'un moment, je réalise qu'il ne s'agit que d'une manifestation d'indifférence envers mon prochain. Ce n'est pas très grave puisque, de l'extérieur, les deux sentiments sont presque semblables.

samedi 12 juillet

Tout serait plus simple si la décision d'être heureux pouvait être prise de manière globale, irréversible. Mais il y a toujours ce petit saboteur tapis dans un recoin en train de bricoler ses petites bombes dont les explosions sont à peine perceptibles. Il grignote du terrain, on le repère, on le chasse d'un coup de pied. Il se fait oublier un moment puis se remet au travail, infatigable.

dimanche 13 juillet

Les rêves ne sont pas (seulement) un catalogue de refoulements présentés sous forme d'énigmes à décrypter. Oubliez donc le charlatan viennois (comme l'appelait Nabokov) et observez par vous-même. Par exemple, notez les images au saut du lit, comme Burroughs vers la fin de sa vie. Un peu plus tard, pendant le petit déjeuner, soyez attentif à vos associations d'idées. Lorsque je travaille à quelque chose (cela m'arrive), j'ai constaté que mes idées venaient de là. L'essentiel du travail se fait pendant le sommeil. Pourquoi chercher avec difficulté le jour ce que l'on trouve sans effort la nuit ?

lundi 14 juillet

C'est décidé : j'oublie la politique (qui elle, se souvient toujours de moi, je connais l'argument). En fait, je voulais dire les politiciens. Quand on voit, dans des vieux journaux ou des images d'archives, ces types en costumes démodés se lancer dans des exercices de réthorique, toute cette agitation paraît tellement dérisoire.

mardi 15 juillet

" Easy now ! *". L'autre jour, j'ai passé deux heures merveilleuses à Roissy. S'il y en avait un pas trop loin de chez moi, c'est dans un aéroport que j'irais faire ma promenade quotidienne.

* Jerry Lee Lewis avant d'attaquer un solo de piano.

mercredi 16 juillet

Comment font les journalistes exposés à longueur de journée aux malheurs de la planète ? Ils tiennent le choc en branchant leur cerveau sur le mode computationnel (pur traitement de l'information). Je vous conseille d'en faire autant.

jeudi 17 juillet

En 1997, bien que l'ordinateur ait été construit spécialement pour l'occasion et que les meilleurs informaticiens se soient mobilisés (analyse et exploitation des tournois), c'est encore l'être humain qui a gagné contre la machine. Comment ? En utilisant la ruse et les conduites de détours.

vendredi 18 juillet

Je ne me lasse pas de la musique sur internet. Dernière trouvaille en date : Jimi Hendrix in the west, un chef-d'oeuvre jamais réédité en CD. Même si je sens vaguement que cela n'intéresse personne, je ressens tout de même le besoin de vous exprimer ma joie (après tout, Kant ne dit-il pas que le beau est ce qui plait de manière universelle et sans concept ?).

samedi 19 juillet

Parfois, je me dis que ce que je fais là, c'est le degré zéro de l'expression (même pas de prise en compte du média internet, pas un poil de net art, activité d'écriture limite anachronique). Heureusement, à d'autres moments, je me dis qu'il n'y a pas grand chose de mieux à faire (sur terre comme au web) que ça : aligner des mots pour essayer de cerner des états mentaux.

dimanche 20 juillet

Les deux méchants qui ont déclenché la guerre en faisant un bras d'honneur à ceux qui n'étaient pas d'accord sont victimes d'une mystérieuse malédiction. Enlisement de l'armée en Irack entraînant une chute dans les sondages pour l'américain, affaire Kelly pour l'anglais. Comme dans Les sept boules de cristal (mon Tintin préféré).

>>

 

Index-1-2-3-4-5-6-7-8-9-10-11-12-13